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*h₁éḱwos

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*h₁éḱwos (anciennement reconstitué sous la forme *ekuo-) est le mot en proto-indo-européen désignant le cheval. Cette reconstitution a donné lieu à diverses théories quant à la domestication du cheval, et à son utilisation.

Reconstitution

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L'évolution des langues permet de reconstituer un terme d'origine commun par comparaison. Celle relative au mot « cheval » implique un indice à travers l'évolution entre i-qo en linéaire B, et ἵππος en grec ancien[1], mais aussi une comparaison avec le latin equus, et le sanskrit áśva-[2]. La forme *h₁éḱwos est retenue par l'édition de 2006 du dictionnaire de l'université d'Oxford pour la reconstitution proto-indo-européenne, et fait relativement consensus parmi les linguistes[3]. Les langues celtiques et germaniques partagent l'étymon *márko-, constituant une variation régionale[4],[5].

Quelques descendants de la racine indo-européenne *h₁éḱwos[6] :

La première tentative de reconstitution de ce mot est le fait de A. Walde et J. B. Hoffmann. Initialement, le terme proto-indo-européen a été reconstitué par convergence entre des langues anciennes (equus en latin ; áśva en sanscrit...) et se rapproche de la reconstruction IE *ōku (« rapide »)[7].

Le conte de Schleicher

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Le cas du mot « cheval » en indo-européen est popularisé par le linguiste comparatiste allemand August Schleicher (1821–1868), qui est le premier à reconstituer suffisamment de mots en proto-indo-européen pour rédiger un conte, mettant en scène une mouton et un cheval, publié en 1868[8]. La reconstitution initiale du mot par Schleicher est akvams, témoignant d'une forte évolution théorique depuis cette époque[9].

Remise en cause et réponses

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En 2014, l'archéologue Jean-Paul Demoule estime, dans un ouvrage grand public, que la reconstitution indo-européenne du mot « cheval » ne fonctionne pas, et ne prend pas en compte toutes les racines linguistiques connues[10], ce à quoi répondent Thomas Pellard, Laurent Sagart et Guillaume Jacques, qui soulignent le manque de connaissances linguistiques de Demoule[11].

Le cheval dans la société indo-européenne

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L'un des principaux débats autour du cheval dans la société proto-indo-européenne porte sur son statut d'animal sauvage ou domestique[12]. Adrian Parvelescu postule ainsi que le mot reconstitué ait désigné le cheval domestique[13].

Le cheval indo-européen est vraisemblablement un animal de petite taille, chassé comme source de nourriture et sacrifié rituellement, avant d'être domestiqué comme monture et pour tracter les chars[14].

Du fait que les langues indo-européennes actuelles comportent des champs sémantiques très vastes pour désigner des concepts liés aux chevaux (allant de leurs usages à leurs couleurs de robes), il est vraisemblable que ce fut également le cas en proto-indo-européen[15].

La diffusion de la langue proto-indo-européenne s'effectue vraisemblablement grâce au cheval, des pasteurs cavaliers la diffusant sur un vaste territoire à partir des steppes[16].

Notes et références

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  1. Mallory et Adams 2006, p. 28.
  2. Mallory et Adams 2006, p. 135.
  3. Mallory et Adams 2006, p. 50 ; 139.
  4. Mallory et Adams 2006, p. 139.
  5. Romain Garnier, « Compte-rendu de Jean-Paul Demoule, Mais où sont passés les Indo-Européens? », Wékwos, vol. 2,‎ , p. 279-283 (lire en ligne)
  6. * (en) Ryan Platte, Equine Poetics, Washington, DC, Center for Hellenic Studies, coll. « Hellenic Studies Series 74. », , 199 p. (lire en ligne), p. 5.
  7. Windekens 1975, p. 62.
  8. Mallory et Adams 2006, p. 45.
  9. Mallory et Adams 2006, p. 46.
  10. Jean-Paul Demoule, Mais où sont passés les Indo-Européens ? : Le mythe d'origine de l'Occident, Paris, Editions du Seuil, coll. « La Librairie du XXIe siècle », , 741 p. (ISBN 978-2-02-029691-5).
  11. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01871582/document
  12. Mallory et Adams 2006, p. 154.
  13. Parvulescu 1993, p. 70.
  14. Parvulescu 1993, p. 69.
  15. Mallory et Adams 2006, p. 119.
  16. Mallory et Adams 2006, p. 101.

Bibliographie

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  • [Mallory et Adams 2006] (en) James P. Mallory et Douglas Q. Adams, The Oxford introduction to Proto-Indo-European and the Proto-Indo-European world, Oxford, Oxford University Press, (lire en ligne)
  • [Parvulescu 1993] Adrian Parvulescu, « The Indo-European horse: A linguistic reconstruction », WORD, vol. 44, no 1,‎ , p. 69–76 (ISSN 0043-7956, DOI 10.1080/00437956.1993.11435895, lire en ligne, consulté le )
  • [Seringe 1999] Philipe Seringe, « Le cheval : sources archéologiques et linguistiques indo-européennes », dans Le cheval en Eurasie : pratiques quotidiennes et déploiements mythologiques, L'Harmattan, (ISBN 273847845X et 9782738478450)
  • [Windekens 1975] A. J. Van Windekens, « Les termes “chien” et “cheval” en indo-européen », Indogermanische Forschungen, vol. 80, no 1975,‎ , p. 62–65 (ISSN 0019-7262 et 1613-0405, DOI 10.1515/9783110243222.62, lire en ligne, consulté le )