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Révolution anti-bureaucratique

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Révolution anti-bureaucratique
Pays Drapeau de la République fédérative socialiste de Yougoslavie Yougoslavie
Date 1988 à 1989

La révolution antibureaucratique est une série de manifestations menées par des partisans du leader serbe Slobodan Milošević qui se sont déroulées entre 1988 et 1989 en Yougoslavie. Ces manifestations ont renversé les gouvernements des provinces autonomes serbes de Voïvodine et du Kosovo, ainsi que le gouvernement du Monténégro, et les ont remplacés par des alliés de Milošević, lui donnant ainsi le pouvoir au sein du conseil présidentiel yougoslave.

Le nom de « révolution antibureaucratique » (en serbe Антибирократска револуција/Antibirokratska revolucija) provient des critiques contre ces structures gouvernementales, considérées comme trop bureaucratiques et corrompues.

Ces protestations soutenaient le nationalisme serbe, une Yougoslavie centralisée, le libéralisme économique et Milošević. L'antagonisme croissant a participé à la dissolution de la Ligue des communistes de Yougoslavie au pouvoir en 1990, à l'éclatement de la Yougoslavie et au début des guerres de Yougoslavie.

Causes profondes

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Depuis l'adoption de la constitution yougoslave de 1974, des désaccords envenimaient les relations entre la Serbie et ses provinces autonomes, qui ne respectaient pas suffisamment les décisions prises à Belgrade. En effet, elle prévoyait une certaine indépendance pour ces territoires. Ces derniers détenaient par ailleurs un siège à la présidence yougoslave, aux côtés des six autres républiques, ce qui leur garantissait une certaine indépendance politique[1].

Au Kosovo, les manifestations de 1981 ont été massivement réprimées par l'armée yougoslave à cause de leur dimension nationaliste et violente. Les serbes du territoire ont longtemps conservé un ressentiment à l’égard des populations albanaises à l'origine des mouvements.

L’ascension au pouvoir de Milošević, en a ainsi coïncidé avec les tensions entre serbes et albanais au Kosovo[1].

Causes immédiates

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En 1987, une campagne populiste démarre en Serbie contre cette situation qualifiée d'intenable. Des tribunes ont par exemple été publiées dans la rubrique Echos et réactions (Odjeci i reagovanja) du journal Politika. Les dirigeants provinciaux y étaient accusés d'inefficacité[2],[3].

Un slogan populaire de l'époque ajoutait une dimension nationaliste : « Oh Serbie en trois parties, tu seras à nouveau entière » (Ој Србијо из три дела поново ћеш бити цела, oj Srbijo iz tri dela ponovo ćeš biti cela)[4].

Cette campagne devait faire passer plusieurs messages :

  • Les Serbes au Kosovo étaient harcelés par les Albanais.
  • Les dirigeants kosovars étaient bureaucratiques et éloignés du peuple.
  • La Serbie avait perdu le contrôle d'une partie de ses provinces à cause de la constitution de 1974.
  • Cette dernière aurait été influencée par les autres républiques yougoslave qui voulaient affaiblir la Serbie. Un gouvernement confédéral avait ainsi été créé (ce système nécessitant un consensus, l'ajout de 2 provinces contrebalançait le pouvoir serbe).
  • Par conséquent, une révision en profondeur de la constitution fédérale et le renforcement du contrôle serbe sur ses provinces étaient nécessaires[5].

Déroulement des manifestations

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Les premières manifestations ont commencé en . Elles sont d'abord de taille réduite (les premières manifestations ne regroupaient que quelques centaines, voire quelques milliers de participants à Belgrade et au Kosovo). La plus grande manifestation de ce type a eu lieu à Kosovo Polje en , et a rassemblé environ 20 000 personnes[2].

Cependant, entre juin et septembre, les manifestations ont augmenté en taille - passant de quelques milliers à plusieurs centaines de milliers - et en nombre (plus de 39 villes étaient concernées en septembre)[2].

Le , environ 150 000 personnes se sont rassemblées à Novi Sad pour protester contre le gouvernement provincial de Voïvodine, dirigé par Milovan Šogorov, Boško Krunić et Živan Berisavljević. Les dirigeants locaux ont été pris par surprise et ont d'abord essayé de négocier, sans succès, avec Milošević, pour conserver leur pouvoir et l'autonomie de la province[2].

Après avoir coupé l'eau et l’électricité, ce qui n'a eu pour effet que l'augmentation du nombre de manifestants, le gouvernement de Voïvodine a ensuite tenté de leur distribuer de la nourriture, notamment des yaourts, qui furent jetés sur le parlement. Ces manifestations sont aussi appelées « révolution des Yaourts »[6],[7].

Le , les dirigeants de la province démissionnent et sont rapidement remplacés par des hommes de confiance de Milošević.

Rassemblement d'Ušće

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Un rassemblement à Ušće (un quartier de Belgrade) a eu lieu le . Il a rassemblé entre plusieurs centaines de milliers et un million de personnes, venues de toute la Yougoslavie. Milošević y a réaffirmé son engagement pour les serbes au sein de la Yougoslavie[8] :

Nous gagnerons la bataille pour le Kosovo quels que soient les obstacles qui se dressent devant nous, dans le pays et à l'étranger. Nous gagnerons malgré l'union de nos ennemis [...]. Notre nation gagnera la bataille pour la liberté.

Monténégro

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Au Monténégro, le premier rassemblement de soutien aux Serbes du Kosovo et aux Monténégrins du Kosovo a eu lieu à Titograd le [9].

Le , la police est intervenue contre des manifestants exigeant la démission des dirigeants monténégrins. Ces derniers ont proclamé l'état d'urgence qui n'a pas duré longtemps, car considéré comme un acte d'hostilité envers la Serbie. Le , ce sont plus de 10 000 manifestants qui se sont rassemblés à Titograd[10],[2].

Les dirigeants, désorganisés, démissionnèrent et furent remplacés par des alliés de Milošević : Momir Bulatović, Milo Đukanović et Svetozar Marović notamment[10]. La Ligue des communistes du Monténégro fut ensuite transformée par le « triumvirat » en Parti démocratique des socialistes du Monténégro. Le parti est resté au pouvoir jusqu'en 2020, date à laquelle il a été vaincu pour la première fois lors des élections législatives.

Les principaux dirigeants kosovars, Azem Vllasi et Kaqusha Jashari, ont été remplacés en [2]. Mais les manifestations se sont poursuivies, notamment par la grève des mineurs du Kosovo de 1989 et, le , par un autre rassemblement à Belgrade où les chants « Nous voulons des armes » et « Arrêtez Vllasi » ont été entendus. Trois jours plus tard, Vllasi a effectivement été placé en état d'arrestation[2].

En 1989, des amendements constitutionnels, qui avaient pour but de réduire l'autonomie de cette province majoritairement albanaise, ont été présentés au Parlement de Serbie. Malgré des manifestations réprimées, le boycott du vote par les représentants albanais et l'absence de la majorité des 2/3 des voix requise, la constitution fut amendée[11].

Rassemblement du Gazimestan

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Un immense rassemblement, réunissant plus d'un million de personnes a eu lieu au monument Gazimestan le .

Une tentative de manifestation à Ljubljana a été empêchée par les polices slovènes et croates. Cet évènement peut être considéré comme un prémisse à l'indépendance slovène et la guerre qui s'ensuivit[12].

Conséquences

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Les événements ont été condamnés par les gouvernements communistes des républiques yougoslaves occidentales (en particulier les républiques socialistes de Slovénie et de Croatie), qui ont vu leurs territoires épargnés par ces révoltes.

La révolution anti-bureaucratique a affecté l'équilibre des pouvoirs dans la présidence de la Yougoslavie, les membres serbe, kosovar, monténégrin et de Voïvodine accordant leurs votes. La réduction de l'autonomie des provinces, sans aller jusqu'à l'abolition complète de leur statut était intentionnelle : Milošević avait besoin des votes des représentants provinciaux pour conserver sa majorité[11].

Un second bloc, constitué des membres croate, slovène, macédonien et bosnien apparaît en après l'arrivée de Stjepan Mesić comme représentant de la Croatie, à la suite de la révolution des rondins. Il empêche les demandes de Milošević d'instaurer l'état d'urgence, puis la loi martiale, et bloque de fait la présidence.

Ces évènements sont donc précurseurs des guerres yougoslaves et de l'éclatement de la Yougoslavie[13].

Notes et références

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  1. a et b (en) Dejan Jović, Yugoslavia: A State that Withered Away, Purdue University Press, , 432 p. (ISBN 1557534950), p. 172-186
  2. a b c d e f et g (sr) Olivera Milosavljević, Antibirokratska revolucija 1987-1989 (ISBN 953-6922-06-1, lire en ligne), p. 319-336
  3. (en) Aleksandar Nenadović, Politika in the Storm of Nationalism, Central European University Press (ISBN 978-963-9116-56-6)
  4. (sr) Petar Ignja, « Duh Belog dvora », Nedeljne informativne novine,‎ (lire en ligne Accès libre)
  5. (en) Ian Kearns, « Western Intervention and the Promotion of Democracy in Serbia », The Political Quarterly,‎ , p. 23-30 (ISSN 0032-3179, lire en ligne Accès libre [PDF])
  6. (en) Emil Kerenji, Serbia Since 1989: Politics And Society Under Milosevic And After, University of Washington Press, (ISBN 978-0-295-98538-1, lire en ligne), p. 350-379
  7. (en) Michael Dobbs, « Crash of Yugoslavia's Money Man », The Washington Post,‎ (lire en ligne Accès libre)
  8. (en) « Disintegration Years 1988-2000 », sur Град Београд - Званична интернет презентација | Disintegration Years 1988-2000 (consulté le )
  9. « Bili Srbi, a sada ih svrbi », Dan,‎
  10. a et b (en) Milan Milošević et Milan Milošević, « The Technology Of A Showdown », Vreme News Digest Agency,‎ (lire en ligne Accès libre)
  11. a et b (en) Heike Krieger, The Kosovo Conflict and International Law: An Analytical Documentation 1974-1999, Cambridge University Press, (ISBN 9780521800716, lire en ligne), p. 522
  12. (en) Božo Repe, « Historical Circumstances in Which "The Rally of Truth" in Ljubljana Was Prevented », Journal of Criminal Justice and Security,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. The Death of Yugoslavia, BBC documentary, 1995

Bibliographie

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Articles connexes

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